vendredi 19 avril 2013

LES "TAROTS DE BESANÇON"... ET AUTRES...


Ce nom désigne un style de jeux de Tarot avec des caractéristiques très particulières, qui sont nées, estime-t-on, dans la ville de Besançon, en Bourgogne, à proximité de la Suisse.

Bien sûr, nous parlons ici d'une variante de ce qu'on désigne sous le nom de "Tarot de Marseille". Vraiment la zone géographique dans laquelle elle s'est développé le style distinct des Tarots dit "de Besançon" se situe entre l'Est de la France, la Suisse et certaines régions d'Allemagne.

On relève sa présence dans les bourgs qui longent la frontière Est de la France, des deux côté de la lisière... Cette zone est appelée par certains chercheurs concernant l’origine des tarots "la route des tarots". En effet, il semble que les tarots ont souvent suivit cette route qui traverse l’Europe de part et d’autre de l’Italie du Nord au Pays Bas.

Bien que la plupart des historiens des tarots classent les "Tarots de Besançon" parmi les tarots qui sont nés après le Tarot de Marseille, plusieurs nouvelles données viennent démontrer le contraire... Les modèles du Tarot de Besançon seraient nés même un peu avant les tarots parus à Paris en 1650!


Tarot de Besançon  (Strasbourg, 1650 ? - 1750)

En vérité, nous parlons ici des ancêtres du Tarit dit "de Besançon", que je classe pour ma part dans les "Tarots Flamands" (tarots belges), qui sont nés à Strasbourg.

Une des particularités des Tarot de Besançon c’est que les noms de deux lames ont été changés, il s’agit des arcanes de LA PAPESSE et du PAPE qui ont été remplacés respectivement par Junon et Jupiter... Les Tarot Flamands, pour leur part, avaient remplacé LA PAPESSE par le Capitaine Espagnol et LE PAPE par Bacchus.

Il est très difficile de savoir quand ont commencé à être publiée les premiers Tarots de Besançon dans la version dite JJ (Junon et Jupiter).

La seule version connue d’un Tarots de Besançon dans une version précédant les Tarots de Marseille est celle réalisée au début du XVIIIe siècle par un dénommé François Héri, recteur en chef du village suisse de Soleure.

Tarot de Besançon J.B. Benois, Strasbourg

Le Tarot de la version dite « de Besançon » est peut-être l’invention des cartiers-éditeurs Benois (ou Benoit), une famille qui fut dévouée durant plusieurs générations à l’éditions de cartes à jouer et de tarots, basée à Strasbourg. Il semble que les Tarots de la maison Benois et de François Héri soient assez semblables, à quelques différences près.



À Belfort, en 1760 (ville française au carrefour des frontières suisses et allemandes, le cartier Jean-Pierre Laurent, diffuse une version du Tarot de Besançon.


Tarot Jean-Pierre Laurent (Belfort 1760)

Des cartiers à Marseille produiront aussi des versions du Besançon, mais lui donnerons le surnom de « Tarot Italien » (ce qui ajoute beaucoup à la confusion au sujet de ces tarots).

Il faut savoir que la popularité du Tarot avait déclinée en France déjà depuis la fin du XVIIe siècle, et il y est progressivement globalement oublié à part en Provence et dans les zones frontalières avec l'Allemagne et la Suisse.

Encore cité dans certains dictionnaires et encyclopédies, il est assimilé à un jeu de carte non français et souvent confondu avec le jeu de cartes à enseignes espagnoles... La production française des tarots (Marseillais et de Besançon) sont principalement destinées à l'exportation, notamment vers le Piémont ou l'Allemagne. À la fin du XVIIIe siècle, il n'est guère plus joué sur le territoire français qu'en Alsace, Franche-Comté et Provence.

Cela dit, les dit « Tarots Italiens » sont pour la plupart inspiré des nouveaux tarots de Besançon. Au milieu du XVIIIe siècle les cartiers allemands abandonnent progressivement d'une part les enseignes italiennes au profit des enseignes françaises, et d'autre part les atouts classiques au profit de motifs animaliers ou de scènes pittoresques. À la fin du XIXe siècle, ces Tarots d'un genre nouveau relanceront la mode du jeu en France. C’est l’apparition des Tarots "italiens" à double-tête. Et pour rajouter d’avantage à la confusion, ces tarots seront appelés : "Tarots Classiques".

Le Tarot classique est produit, par exemple, par Lequart (qui sera racheté par Grimaud) sous la désignation de « Tarot italien ». On trouve aussi des tarots italiens à double-tête (Grimaud, Gaudais). Ces tarots à enseigne italiennes cohabitent avec différents types de Tarots à enseigne française.

Les Tarots de Besançon qui seront enfin diffusés à partir de Besançon apparaissent seulement autour de 1780, donc à peu près 20 ans après le Conver de Marseille (diffusé à partir de 1761). La version connu de ces Tarot dit de Besançon seront surtout produits en Suisse. La version la plus connu fut celle de Jean Jerger dont il nous reste quelques copies.


Tarot de Besançon Jean Jerger

Les Tarot de Besançon faits à Besançon-même sont des copies améliorées des tarots plus anciens conçus à Strasbourg (J. B. Benois). La plupart de ces tarots sont semblables au Tarot de J. Jerger.

En marge, la tradition des Tarots de Marseille, se fera perpétuera principalement en Suisse avec François Héri et Claude Burdel... La tradition du Tarot de Marseille et sa conformité doit beaucoup à Claude Burdel... Beaucoup plus que le laissent entendre les historiens du Tarot.

Donc, à partir des alentours de 1735, seront diffusés parallèlement des tarots de Marseille (provenant surtout de Suisse) et des tarot de Besançon (provenant de Besançon, Paris ou Marseille !)



« Le Tarot de Lequart » signé Arnoult (1748)

Une version dite du "Tarot de Besançon" sera donc aussi diffusé par un cartier de Paris sous le nom de  "Tarot Lequart » signé Arnoult (1748). Il s’agit là, plus ou moins, d’un "Tarot de Besançon", mais dont la plupart des cartes sont très proches du canon des tarots de Marseille, et qui, de plus, affiche une "fausse date", quant à son origine. Ce qui est facile à constater de soi-même, seulement en le comparant à d'autres tarots de la même époque.. (Déjà les méthodes d'imprimerie en 1748 ne permettaient pas de réaliser de telles cartes !!!) En vérité, le "Tarot de Lequart" signé Arnoult (1748) a été produit seulement à partir de 1810. Ici la date de 1748 se réfère au modèle qui a servit à Arnoult, sans aucun doute un tarot Suisse.

C’est le Tarot créé par Épinal en 1830, diffusé par la maison Pellerin & Co (Vosges) qui deviendra le plus populaire et le plus répandu en France. Les Tarots dit « d’Épinal » deviendront vite populaires partout en Europe. Ils seront aussi produits, dès lors, dans d’autres versions semblables en Suisse et en Italie...


Tarot d'Épinal

Cette version-ci amène de nouvelles modifications... Avec Junon et Jupiter, qui remplaçaient déjà LA PAPESSE et LE PAPE, voici maintenant LE BATELEUR qui devient L’ESCAMOTEUR, et L’ERMITE qui devient LE CAPUCIN!

Il faut noter aussi que cette version modernisée redessinée du tarot de Besançon par Épinal présente des couleurs qui ne correspondent pas aux jeux anciens du Tarot de Marseille, et est aussi bien différent de ces ancêtres, mais par contre, par son côté nouveau, actualisé et plus attrayant il aura la faveur du public, qui a plus d’attirance pour les belles images que pour l’authenticité des tarots selon une prétendue conformité... À cette époque le souci d’authenticité était loin de préoccuper les joueurs...

Enfin, cette version du Tarot de Besançon créé par Épinal propose des illustrations certainement plus attrayantes pour l’époque qu’un vulgaire Conver authentique plutôt "moyenâgeux"... De plus, il est à relier à toute l’Imagerie d’Épinal (très en vogue à l’époque), c’est une des raisons qui en faisait son intérêt.

Aussi, le Tarot d’Épinal sera le modèle qui inspirera la plupart des tarots dit "modernes", comme le "1JJ Suisse", et même des tarots modernes italiens! Ayant la cote surtout chez les joueurs, on affublera presque aussitôt les lames mineures avec les enseignes plus commodes ; trèfles, cœurs, carreaux, piques.

Tarot Suisse 1 JJ

Les joueurs préféreront ces tarots du style dit « de Besançon » modifiés expressément pour le jeu, au Tarot de Marseille... Et les Tarots de Besançon deviendront donc les tarots les plus en populaires, jusqu’à ce que la version de Paul Marteau remette le Tarot de Conver en circulation en 1930 (dans une version peu authentique mais qui deviendra la version universellement la plus connue).

À Marseille, Jean-Baptiste Camoin qui avait commencé par récupérer la fabrique de Nicolas Conver, et avait fait main basse sur tout le marché de la carte à jouer dans la métropole phocéenne. Modernisant les modes de productions, il publia d’abord notamment autour de 1880 une version modifiée du Tarot de Nicolas Conver avec une palette de couleurs restreinte adaptée aux nouveaux modes de production industrielle. On lui doit d’avoir maintenu la diffusion du Tarot de Marseille, et d’avoir fait du Conver une référence.

Mais les "Tarots de Besançon", les tarots dits "Italiens" et "Tarots Classiques", deviendrons tout de même  les plus populaires auprès des joueurs, surtout à partir de la parution d'un deuxième jeux dit "d'Épinal", cette fois un jeux "à deux-têtes", inspirés des tarots allemands. Surnommés le "Tarot aux Armes" d'Épinal, à cause du choix de ces illustrations...

"Tarot aux Armes" d'Épinal


"Tarot aux Armes" d'Épinal

Le "Tarot aux Armes" d'Épinal, sera le tarot le plus populaire partout en Europe... Il était essentiellement utilisé pour le jeu... Mais il était aussi utilisé pour la divination par les bohèmes, et tziganes...

Maintenant récapitulons...

- Un Tarot dit "de Besançon" est nécessairement un tarot avec les arcanes de JUNON et JUPITER

- Un "Tarot Italiens", pour le peu qu'il doit au tarot de Besançon, devrait être considéré plutôt pour être un "Tarot Piedmontais" ou "Tarot Lombard", puisque pour la plupart, les tarots modernes d’Italie sont revenus aux enseignes de LA PAPESSE et du PAPE et à une iconographie très proche des antiques tarots italiens.

Parler d'un "Tarot Classique" c'est absolument imprécis... D'innombrables tarots ont été publiés sous ce simple nom... Entre autre, le Burdel/Gassmann, le Chosson, et le Conver!  (Et encore, ce terme sert a désigner des tarots de Besançon ou de Marseille, et enfin les nouveaux jeux de tarots (souvent à "têtes-doubles") conçu expressément pour le jeu., qui sont, en vérité des copies modernisées du "Tarot aux Armes" d'Épinal...



"Tarot Classique" à tête double (pour le jeu)

On trouve toujours les versions plus modernes du Tarot de Besançon dans les boutiques, surtout dans la version "Tarot Suisse 1JJ" et la version Française, mais attention ! À cause de la confusion qui règne au sujet des appellations des tarots, ils sont bien souvent vendus indifféremment sous les noms erronés de : "Tarot de Marseille", "Tarot Italien", ou "Tarot Classique").

Ces tarots sont les jeux utilisés le plus couramment par ceux qui jouent au jeu du Tarot. Mais pour ceux qui pratiquent la divination, ou qui veulent procéder à un cheminement personnel ou une initiation avec le Tarot, il est fortement recommandé d’utiliser un « Tarot de Marseille » traditionnel conforme. (À cet effet, donc, il vaut mieux s’en tenir aux tarots qui ont été créés et diffusés entre 1650 et 1760 – Noblet, Dodal, Burdel, Conver).

Le Tarot d’Épinal quant à lui, dans sa version originale, peut être utilisé pour le tirage des cartes... Il est même assez efficace! Il faut reconnaître qu’il a beaucoup inspiré le jeu d’Etteilla. Et même si les noms de certains arcanes ne correspondent pas à ceux du Tarot de Marseille traditionnel, ils ne sont pas moins éloquents, et si vous êtes apte à vous mettre d’accords avec ces sympathiques surnoms, vous trouverai très agréable de vous servir de ce jeu...

Et puis, les présences incongrues de Junon et Jupiter, sont autant un sujet de controverse chez les tarologues qu’une manière instructive d’aborder la mythologie associée au tarot... L’Énigme posée par les tarots de Besançon n’est vraiment pas sans intérêt... Si vous vous trouvez privez de la papesse et du pape vous vous retrouvez par contre avec deux nouveaux sujets d’étude à approfondir... Cette modification, convenue par respect envers les autorités de l’Église, s’est fait de manière plutôt astucieuse, par de petits roublards et sans aucun doute le Tarot de Besançon est un brin satyrique...

Tout compte fait, il est possible de trouver un Tarot de Besançon qui vous plaira au point d’en faire votre Tarot Personnel... Si c’est le cas, les tarots d’Épinal et le tarot 1 JJ Suisse sont les deux versions les mieux appropriées.

3 commentaires:

  1. Besançon est en Franche Comté et non en Bourgogne !

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    1. Le véritable nom de Franche Comté c'est Comté de Bourgogne qui a dérivé en Franche Comté de Bourgogne puis Franche Comté. La bourgogne est une territoire qui a été divisé en deux : Le comté et le duché. Donc Besançon géographiquement est en bourgogne, sauf administrativement et pour les incultes...

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  2. C’est n’importe quoi, ou une interprétation personnelle de l’histoire et de la géographie

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