vendredi 15 février 2013

ALEISTER CROWLEY (1875-1947)


Edward Alexander Crowley (12 octobre 1875 à Leamington Spa dans le Warwickshire – 1er décembre 1947 à Hastings), dit Aleister Crowley, est un écrivain et occultiste britannique.

Fils d'une riche famille protestante fondamentaliste, il abjura la foi chrétienne à l'adolescence, après la mort de son père. À Cambridge, il changea son prénom d'Edward à Aleister et commença à s'intéresser à l'occultisme. Initié au sein de la Golden Dawn, il s'en détacha rapidement pour poursuivre sa propre voie ésotérique, basée sur une « magie sexuelle » sans tabou. Il dilapida sa fortune aux cours de ses recherches qui le menèrent partout dans le monde.

Il devint rapidement très controversé, tant pour ses mœurs sexuelles que pour ses idées occultes, mais aussi pour ses idées politiques. Germanophile, il devint indésirable en Grande-Bretagne avec la Première Guerre mondiale.

Il fut chassé de Sicile où il s'était installé, après divers scandales. Il continua ses errances. Il mourut d'une crise cardiaque liée à une bronchite chronique due à sa forte consommation de drogues. Il fut incinéré à Brighton et ses cendres auraient été perdues.

Aleister Crowley, joueur d'échecs, alpiniste, poète, peintre, astrologue, adepte des drogues, etc., est surtout connu pour ses écrits sur l'occultisme et particulièrement pour le Livre de la Loi, le livre sacré de Thelema.

Crowley était également membre influent de plusieurs autres organisations occultes : l'A.'.A.'. et l'Ordo Templi Orientis. Concernant cette dernière organisation, il participa même à la réécriture complète de ses rituels en fonction de la Loi de Thelema.

Crowley, Thelema & le "Sexisme"
Par Nun Tzaddi

La Magick de Crowley et Thelema, traitent rarement dans les textes disponibles des relations hommes-femmes, sauf, sous un jour purement technique, des opérations de magie sexuelle.

À la lecture de certaines œuvres ou de certains rituels, il est évident que Crowley instrumentalisait la Femme, en la réduisant à un élément technique, à un outil de la Volonté du magicien.


Ne voulant pas entrer dans un débat "moral" sur le besoin de l’équilibre des "Forces Sœurs", mâle & femme, il nous semble toutefois important d’analyser plus avant la vision qu’avait Crowley de la Femme. Le texte, inédit en français, de NunTzaddi 950 semble idéal pour le but ainsi défini...

Les déclarations faites ici sont destinées à refléter mon expérience d’Aleister Crowley, & ne doivent pas être comprises, de quelque manière que ce soit, comme une généralisation des personnes qui appartiennent aux organisations thélémites qui suivent les enseignements de Crowley. Il y a déjà des preuves de critiques similaires au sein des échelons supérieurs de l’OTO, mais il demeure une poignée d’individus qui ou bien ne sont pas conscients de la métaphysique de Crowley ou bien qui désirent perpétuer ce "metaphucking" absurde.

Je débuterai cette série d’articles du "Centre de la Pestilence" avec cet extrait du "Liber AL vel Legis".

Saint Paul chanta la dithyrambe de l’agape dans "I Corinthiens". Il existe plusieurs sortes d’amour si par ce mot français nous voulons signifier toutes sortes d’attraction, d’homologie, d’engagement, de copulation, etc... Pour nos besoins, nous avons besoin d’un mot plus spécifique – la distinction grecque entre "éros" & "agape" est très utile, bien qu’elle soit un peu obscurcie par les enseignements de Crowley...

Le terme "agape" est habituellement traduit par "charité" ou "amour spirituel". Certains gnostiques licencieux le comprenaient comme se référant à l’amour sexuel partagé de leur Eucharistie orgiaque sans imprégnation – ils développèrent une pratique de l’adoration & de la consommation du sperme en tant que corps du Christ & du sang menstruel comme le Sang du Christ.

Mircéa Eliade discute de cela dans son essai « Esprit, Lumière & Graine » dans « Occultisme, Sorcellerie & Mode culturelle » (Université de Chicago, 1976).

C’était leur banquet de l’agape. Ces chrétiens non-orthodoxes & persécutés mangeaient ces excrétions & s’en enduisaient le corps, ou des talismans & des ex voti tandis qu’ils pratiquaient leur version de la Messe Chrétienne. C’est pour cette raison que l’instruction secrète de Crowley au sujet de la magie sexuelle est écrite sous la forme de la plus explicite rhétorique chrétienne. Cela explique aussi la forme & le contenu gnostique chrétien évident de la Messe Gnostique Thélémite.

Cependant, je suis personnellement gêné par le degré auquel les écrits de Crowley manquent à distinguer "éros" & "agape".

Comme pour la Messe Gnostique Thélémite & sa racine essentielle dans la pratique de la relation magique hétérosexuelle connue sous le nom de IX°, je cite les passages suivants de l’instruction secrète du IX°, Agape vel Liber C vel Azoth… pour l’édification des lecteurs.

On trouve cette instruction dans « Rituels Secrets de l’OTO » (et j’ai également en ma possession un petit livre de Kadath Press in England ("Liber Agape & De Arte Magica"). Comme conséquence des copyrights & de la peur des membres de l’OTO, ce document existe dans un état de prétendu secret alors qu’il est très facile d’en obtenir des copies. Ce secret est malheureux car il entrave toute discussion importante concernant les allégations de sexisme de la part de Crowley & du secret intérieur de l’OTO.

« Car ceci est l’Arcane des antiques Hiérophantes qui, dans ce Culte du Soleil dans le Ciel & du Phallus sur la Terre, peut unir tous les hommes, car ces mystères sont raisonnables & vrais, & aucun homme ne peut les nier. Comme il est écrit : Paix aux hommes de bonne volonté ! Et ceci est le véritable & ultime secret de la Franc-Maçonnerie ; ce Soleil, n’est-Il pas le Grand Architecte de l’Univers, le Père du Système, l’Eidolon du Macrocosme ? » (Liber Agape, section X).

« Maintenant le Père est Un, érigé, seul, éternel.

Et le Fils est Un, dans l’identité du Père, et pourtant double en cette nature, étant Dieu-Homme. Et ici est un Mystère ; car étant le Verbe il est l’Esprit, descendant du Père & créant les mondes.

Et l’Esprit est Un, incréé mais procédant, la graine dont le Père & le Fils sont en vérité des véhicules & des gardiens. Et la nature de l’Esprit est Liberté & comme le vent, Il va & vient comme il Lui est donné d’imprégner les mondes.

Et comme le Fils est double ainsi l’Esprit est-il double ; car Il est à la fois mâle & femelle. Car la Colombe est l’oiseau de Vénus ; déjà notre antique Frère Marcus Valerius Martialis qui était Grand Orateur de l’Empire Romain aux jours anciens avait caché le Phallus Sacré dans cette image. Il est la Mère. Il est la Matrice. Est-Il le Sperme qui fertilise l’Ovule ? Non, mais il est cette chose fertile & vivante par elle-même qui n’est ni le sperme ni l’ovule mais leur mariage, la Parfaite Teinture, la Médecine Métallique, la Pierre Philosophale, la Médecine Universelle, l’Élixir de Vie » (Liber Agape, section XII).

Chaque fois que je lis ces passages, je me demande pourquoi j’ai commencé à lire Crowley comme s’il était sérieux plutôt que sous la lumière de l’analyse freudienne...

Il parle au sujet de la présence de l’Étoile ("Hadit") dans le Sperme. Il dit très clairement que les femmes sont des navires "vides" ("Nuit") qui contiennent cette semence....

À un niveau moins spirituel, il implique que les hommes, en tant que gardiens de cet "Esprit-Sperme" sacré, peuvent copuler sans aucune distinction puisque cet Esprit-Sperme-Volonté est libre, « Et la nature de l’Esprit est Liberté, & comme le vent, Il souffle là où Il le désire afin d’imprégner les mondes ».

Il m’apparaît qu’il veut signifier une notion très objectivée de la femme en tant que "mondes". Cette admonestation à laisser les hommes semer leurs graines est répercutée dans le "Livre des Mensonges".

Revenant au verset 57 du premier chapitre du Liber AL, je suggère au lecteur que Tzaddi est en vérité l’Étoile, mais que ce qu’il signifie est que la Lame du Tarot "L’ÉTOILE" n’est pas l’"Étoile".

Il désirait usurper cette interprétation de l’association traditionnelle avec la femme dans l’Arcane du Tarot "L’Étoile".

En l’attribuant à l’"EMPEREUR" & au signe martial du Bélier, il déroba magiquement (& rhétoriquement) aux femmes leur puissance & leur âme.

Remarquez que la carte précédente est "La TOUR", un symbole d’éjaculation, & la carte suivante est "LA LUNE" que même Crowley accepte comme un symbole de la menstruation. Crowley, un véhément anti-avortement (qui a prétendu dans son essai « Le Devoir de la Femme » que l’obligation & la fonction de la femme dans la vie sont la reproduction) rend tout cela très clair pour moi & pour quelques autres, au travers de ces passages, qu’il souffre d’une envie d’utérus.

Dans plusieurs autres instructions, comme « De Arte Magica », il déclare que les partenaires magiques féminins doivent être soit inférieurs soit inconscients de l’intention réelle afin d’assurer une imprégnation magique efficace de la volonté du magicien sur l’enfant magique.

Comme le Docteur Frankenstein, Monsieur Crowley désire créer un homunculus sans avoir recours aux femmes. Le passage suivant est une apologie sibylline de la sodomie :

« … si (le rapport anal avec les hommes)… évite tout contact avec des plans inférieurs (les femmes) ; qu’il se suffit à soi-même, qu’il n’implique aucune responsabilité, & qu’il laisse ses maîtres non seulement plus forts en eux-mêmes, mais totalement libres de remplir leur Nature essentielle » (Magie en Théorie & en Pratique, chapitre IV, page 27).

Ensuite, dans le Liber Aleph, il parle de Charles Stansfield Jones comme de son enfant magique, tel que prophétisé dans leLiber AL :

« Ici, j’élève haut mes Mains vers toi dans le Signe de l’Entrant, ô Fils de mes Tripes, car avec toute ma puissance magique je ferai en sorte que tu te battes vaillamment & que tu œuvres avec Diligence (avec l’Épée & la Truelle) dans cette œuvre » (Liber Aleph, chapitre 76).

« Mais tu n’es pas le rejeton des Couilles d’un Esclave ; tu te tiens ferme & droit, tu fais ta Volonté ; & tu es l’Élu, & en fait, pour cette Œuvre tu fus conçu dans la Couche Magicke, afin que tu puisses rendre l’Homme libre » (Liber Aleph, chapitre 77).

Le Jardin Parfumé de Crowley est dédié presque entièrement à ce thème du mysticisme anal. Il n’y a certainement rien de mauvais dans tout acte sexuel. C’est plutôt l’interprétation obsessionnelle de la spiritualité comme étant sexuelle, & de la suprême manipulation d’imposer ses "gènes" spirituels sur une autre personne lors de la relation sexuelle – d’engendrer une personne déjà vivante, je crois que vous voyez très bien qu’il s’agit là de vampirisme, bien qu’opposé dans son modus operandi (la force de vie & la Volonté s’introduisent ici dans le corps de la victime).

Crowley décrit également le vampirisme comme un digne hobby au sein du IX° OTO (De Arte Magica, XVIII). Il apparaît, grâce à la préférence de Crowley pour la sodomie passive, qu’il est très probable qu’il utilisait le vampirisme.

Il y a aussi le simple fait que des changements conséquents observables suivant l’interaction sexuelle ne sont pas facilement empreints de la « qualité » de la décharge sexuelle. Les journaux de Crowley enregistrant scientifiquement les opérations de magie sexuelle consistent, plus ou moins, en une brève description des qualités sexuelles de ses partenaires, une brusque description de ce qui s’est passé lorsqu’il eut son orgasme (avait-il peur d’écrire en anglais que son partenaire l’amenait à l’extase avec ses mains ?) & quelques adjectifs décrivant l’"Élixir".

Crowley ne parvient pas à en imposer par ses minables procédures de laboratoire ou par son approche détachée, priapique des relations humaines. Pire, il n’y a absolument aucune analyse psychologique ou scientifique des conditions ou des variables de ces opérations.

Peut-être encore plus insidieuse est l’imposition de ses obsessions sexuelles sur les autres. Il apparaît que Crowley désirait créer une Église de sodomites hémophages désireux de consommer leurs propres excréments & sécrétions sexuelles. J’ai une aversion personnelle par rapport à quelques-unes de ces pratiques, mais je suis sûr de moi lorsque j’insulte Crowley parce qu’il sature ses textes "inspirés" de ses propres prédilections & de les faire passer pour une technologie universelle & pour la loi suprême du Nouvel Éon d’Horus.

La notion assez victorienne des poisons & de l’amour de Crowley soutient qu’il est nécessaire pour nous de tendre vers ce qui nous révulse & ce qui nous fait mal.

Dans le "Liber Aleph", nous le retrouvons sans cesse décrivant les femmes par des généralisations négatives. Il les appelle "Sirènes" & "Vampires" cherchant à détruire l’initié en le distrayant de la voie (Liber Aleph, 100, 103). Les implications sexuelles sont assez claires & il est évident qu’il envisageait cette rencontre comme une épreuve essentielle pour le Néophyte.

Afin d’entrer dans l’A.’.A.’., un compagnon ne peut vous retenir. L’amour ne peut pas vous arrêter. Cela semble normal pour la plupart des magiciens, mais je vous demande de vous arrêter un instant. Est-ce une attitude digne de soumettre des partenaires sexuels & magiques ?

Retrancher toute romance peut rendre la vie plus facile & moins douloureuse, mais cela empêche les profonds changements de notre caractère. Les partenaires magiques/sexuels sont très rares & précieux. Il me semble que le meilleur traitement serait le meilleur traitement qui soit. J’hésite également à attribuer une grande valeur à l’initiation spirituelle offerte par l’abandon de l’intimité en faveur de la concupiscence &/ou de l’« initiation ».

Un autre passage du Liber Aleph, que je pense assez important, est le suivant. Notez que ce livre fut écrit au sommet de l’expérimentation de Crowley au sein du IX° OTO.

« Mon Fils, je te charge de ne jamais révéler la Vérité aux Femmes. Car c’est ce qui est écrit : Ne jette pas les Perles aux Cochons, à moins qu’ils ne se retournent contre toi & te déchirent. Vois, dans la Nature de la Femme il n’y a pas de Vérité, ou d’Appréhension de la Vérité, ou de Possibilité pour la Vérité… Maintenant, pour une Femme tout Mensonge suffit & ne pense pas que la Vérité est puissante & dominera comme Elle le fait avec l’Homme… » (Liber Aleph, 133).

J’ai appris à me méfier des personnes qui se préoccupent & qui sont obsédées par les vampires – psychiques ou autres. Surtout depuis que nous avons des indications claires que Crowley était assez capable de commettre de telles négations machiavéliques des volontés des autres humains. Un vieux proverbe espagnol dit que « Les voleurs imaginent que tous les autres sont comme eux ».

Un aperçu plus profond de l’aveuglement & de la faiblesse de Crowley peut être obtenu en lisant ses journaux magiques rédigés lors de ses périodes frénétiques de magie sexuelle après son initiation au IX° de l’OTO. Dans ses enregistrements scientifiques comme le « Compte-rendu magicke de la Grande Bête 666 », nous le retrouvons modelant des description fantasmagoriques de relation sexuelle avec de nouvelles amantes...

Toutes ces œuvres sexuelles de 1914 à 1924 ont eu pour objets : plus de sexe, plus d’argent, plus de membres pour l’OTO & la publication de ces opérations. Ses commentaires démontraient un intérêt dans les seules réactions physiologiques & poétiques procurées par les femmes & dans la qualité de l’élixir. Il ne montre jamais la moindre considération pour les sentiments de ses amant(e)s.

Je ne pourrais pas non plus trouver un moyen de résoudre ces remarques avec mon propre intérêt dans le féminisme & les problèmes des femmes. Je dois être très clair ici pour ceux qui ne sont pas familiers que le contexte des citations qui précèdent est spirituellement très sérieux. Le IX° est le cœur & l’âme de l’OTO. Sa pratique est l’adoration la plus sacrée de ce système...

On doit également la considérer comme très dangereuse – comme l’Arche d’Alliance des juifs. Je ne pense pas qu’il soit nécessaire de souligner que les comptes-rendus ne font aucunement montre du sérieux de cette instruction secrète.

Par contre il n'est pas seulement explicite quand au style de relation qu,il veut entretenir avec les femmes...Il nous soumet le temps d’un paragraphe à ses lamentations sur le fait qu’un seul défaut « empêche la réalisation de l’idéal romantique » (c’est-à-dire qu’il s’ennuya avec toutes ces femmes..), il poursuit en donnant une longue liste de partenaires sexuels – chacun avec un défaut fatal qui l’empêchait de devenir sa "Babalon" idéalisée, la "putain parfaite". Ensuite, enfin, il semble arriver à une vision utile :

« Tôt ou tard, la théorie de l’Amour rate, même là où la pratique a perduré ; non, même lorsque ma passion s’est fatiguée de la femme, & s’est terminée par une chanson, un poème ou une histoire, ce n’était pas d’elles que je parlais. Ah ! mais j’ai un secret ! Dès que l’on cesse de m’étonner, de m’adorer, d’être mon esclave, la chanson prend fin. Car, toute chanson est une douleur, une attente, un cri de l’âme pour quelque chose de plus grand que soi-même, que cette grandeur soit réelle ou simplement une propre projection & fantasme… Je doute que je puisse aimer car l’Amour se contente de servir & d’adorer là où mon âme désire s’emparer, gagner la maîtrise sur ses propres faiblesses, la preuve de la victoire étant la soumission de la femme, ou son rejet, & ainsi la mort de l’amour. Je note que les plus grands poètes-amants de l’histoire furent toujours faibles par leur humanité, Dante & Pétrarche, Shakespear, tous semblent serviles, ou vantards. Mais, je suis de Catulle, de son école : je peux adorer mon propre idéal & habiller une femme des atours de la Fille du Roi ; mais, hélas ! » (pages 138, 139).


Le poème de "Catulle" extrait de « Odi et Amo », de Crowley  (cité pour votre édification) :

« Je vous donnerai des preuves de ma virilité, giton d’Aurélius et complaisant Furius, vous qui, pour quelques versiculets un peu libres, m’avez accusé de manquer à la pudeur. Sans doute le poète pieux doit être chaste dans sa vie ; dans des versiculets, ce n’est pas nécessaire, car enfin ils n’ont sel ni charme que s’ils sont un peu libres, s’ils manquent à la pudeur, et s’ils peuvent exciter le prurit, je ne dis pas chez les petits garçons, mais chez les vieillards velus qui ne peuvent plus mouvoir leurs reins engourdis. Vous avez lu ces vers où je parle de plusieurs milliers de baisers, et vous me croyez incapable d’être mâle : je vous donnerai des preuves de ma virilité ».

Après avoir repoussé sa digression introspective comme n’étant que "17 pages de boniments", il revient finalement à la raison de cette digression : quand les muses rempliront-elles sa bouche de chants à nouveau ?

La seule raison de son besoin & de sa méditation sur l’amour était qu’il ne pouvait plus écrire de bons poèmes... Il avait besoin d’une amante afin de pouvoir écrire de la meilleure poésie. C’est la seule signification au fait que Crowley désirait plus que tout que l’on se souvienne de lui tout d’abord comme d’un poète... (?)

J’ai une suspicion que l’A.’.A.’. n’était qu’un moyen d’attirer plus d’attention sur sa poésie & sur son pénis au travers du scandale & de la vogue fin de siècle pour la spiritualité alternative... Un regard sur ses amis & fantômes devrait affirmer cette dévotion au programme avant-gardiste & à une campagne de relations publiques ambiguë & si ambitieuse, qui fait que, Salvador Dali lui-même semble sage & apprivoisé en comparaison.

À nouveau, j’ai réalisé qu’en dépit des nombreux talents & des nombreuses réussites de Crowley, qu’il ne savait rien de l’agape...

Je vis & respire agape, ceci explique facilement pourquoi je me sens si différent de Crowley...

J’ai réalisé également que c’est exactement ce dont manquent les rituels de l’OTO (& la maçonnerie également) – du moins, selon mon expérience & mes réflexions à leur sujet. Leur ton est inexplicablement sérieux & formel. Dogmatique et terrain pour toutes formes de manipulations sur les autres...

Peu reste à dire sur la nature impersonnelle, légaliste d’un rituel formel où la logique est plus en jeu que les individus....

Virginia Held, Alison Jaggar & Carol Gilligan ont offert des critiques d’une telle société rationaliste dominée par les mâles!

Par exemple, dans l’OTO, le processus d’initiation qu’ils prétendent universel, objectif & réel, est imperméable aux individus & aux particularités. Par-dessus tout, il se sépare de l’irrationalité du cœur humain. Les leçons que j’ai apprises dans les initiations & par mes expériences sont totalement vides de tout ce qui se rapporte à la confiance, l’intimité, l’émotion ou l’amour (comme je les conçois).

Je trouve que l’OTO est plutôt une fantaisie dominée par des mâles, & déséquilibrée au sens le plus profond. C’est sans doute la seule raison pour laquelle j’ai quitté l’OTO. Je ne pouvais ignorer les passages & les dogmes comme ceux que j’ai cités ci-avant...

L’intimité émotionnelle est un élément très important de l’expérience humaine. En dépit de la vie sauvage de Crowley, il se sentait clairement insatisfait & sans amour...

Je ne sais rien de son état d’esprit. Je suis heureusement marié à une merveilleuse femme & j’ai une vie sexuelle pleine & amusante...

Crowley peut critiquer beaucoup de choses telles l’"Ancien Éon", mais son traitement de l’amour romantique est indicatif d’un cœur froid comme la glace & d’une incapacité à communiquer...

La Géomancie selon Aleister Crowley
Par Melmothia & Spartakus FreeMann


Une lecture critique du "Liber Gaias"

Paru en 1909 dans le second opus de la revue Equinox, le Liber Gaïas est, selon l’aveu de Crowley lui-même, incomplet : « Par ordre de l’A∴A∴ certaines formules y ont été introduites, et des omissions furent faites, afin de rebuter ceux qui veulent le prostituer afin de satisfaire la curiosité ou afin de tromper ». Que l’obscurité du texte soit intentionnelle est en effet possible, mais les mauvaises langues diront que la difficulté vient plus probablement de ce que le livre est constitué de notes de lectures que Crowley a récupérées et compilées, « après un examen scrupuleux » nous dit-il – mais là aussi, on peut douter.

Il en résulte que le texte est particulièrement décousu, obscur et, il faut le dire, d’une totale vanité que vous connaissiez déjà le domaine ou que vous soyez néophyte ; dans le premier cas, vous n’y apprendrez rien, dans le second, vous n’y comprendrez rien. Nous espérons que ce ne sera pas le cas de cette lecture critique.

1/ La géomancie est un art divinatoire arrivé en Europe vers le XIIe siècle par le biais de l’Islam, époque où sont rédigés les premiers traités connus en langue arabe et latine. C’est donc une mancie relativement jeune à l’échelle de l’humanité, même si on peut supposer, avec Toufic Fahd, que des procédés similaires existaient dès le IXe siècle en Orient. Ses origines culturelles ont longtemps été débattues, mais la plupart des indices historiques et linguistiques laissent supposer que notre art a poussé dans le monde arabe. Exit donc les atlantes, les lémuriens et les égyptiens – sans oublier les chinois et les indiens. Concrètement, elle consiste en un tirage au sort de figures au nombre de 16, chacune étant composée de 4 étages d’un ou 2 points (voir l’article La géomancie : mise aux points sur ce site).

En Occident, la géomancie connaîtra un grand succès durant le Moyen Age et surtout la Renaissance, avant de tomber en désuétude supplantée par d’autres arts divinatoires, plus accessibles aux classes populaires notamment l’astrologie. Il faudra attendre les cercles occultistes du XIXe et du début du XXe siècle pour la voir revenir à la mode. Alors qu’une grande partie de l’Afrique conserve une pratique géomantique uniquement basée sur le tirage au sort des figures, en Europe, le rapprochement avec l’astrologie (qui s’est surtout déployé à la Renaissance), est devenu constitutif du domaine, au point qu’il est difficile à l’heure actuelle, en Europe, de parler de géomancie sans évoquer les domifications, aspects, etc. S’en est suivi une complexification notable du système, d’autant que dès le XIIIe, les textes se multiplient, des traités souvent recompilés à partir des mêmes sources qui seront imprimés et traduits dans presque toutes les langues européennes. Aux textes arabes s’adjoindra un énorme corpus de traités en latin et en langue vulgaire, chaque auteur ajoutant ses propres sophistications dérivées de l’astrologie aux apports antérieurs.

Bien que les péripéties linguistiques du terme soient plutôt bien connues, puisqu’on sait que le nom « géomancie » a été attribué artificiellement à cet art divinatoire, demeure toujours le fantasme, tenace chez les adeptes de la communion avec la Terre-Mère, d’une étymologie révélatrice ; et c’est apparemment le cas de Crowley qui nous intitule son bout de traité Liber Gaïas (le livre de la Terre).

Depuis l’antiquité gréco-romaine, la « géomancie » désigne l’art de prédire l’avenir par l’observation des signes naturels de la terre (secousses sismiques, failles, érosion des roches, etc.).

Concurremment à la géomancie, existent, suivant la classification élémentale de Varron : la pyromancie, l’hydromancie et l’aéromancie, toutes basées sur le même principe d’interprétation des « signes naturels ». Au Moyen Age, la manie de scruter la terre est passée de mode. Le tiroir reste vide, jusqu’à ce que l’Europe découvre l’art oriental de faire des points dans le sable alors appelé «khatt al raml» ou ilm al raml». L’occident médiéval, épris de taxinomie et fidèle à Varron, décide de récupérer l’appellation pour désigner cette nouvelle technique, qui prendra désormais le petit nom qu’on lui connaît et qui fera tant gloser les occultistes et les new-ageurs du XXe. L’étymologie erronée va octroyer plein de nouveaux avantages à la géomancie puisque désormais, elle permet la connexion avec les esprits telluriques, notre mère la Terre, et d’autres salades du genre. Dans la foulée, la confusion a également permis le rapprochement avec la magie ; nos figures géomantiques qui n’en demandaient pas tant, se retrouvent dès la Renaissance apposées sur des talismans, puis utilisées pour invoquer les gnomes ; c’est que la géomancie en changeant de nom s’est alourdie en sacralité.

De là sans doute ce passage sur la fabrication d’un sceau qui arrive comme un cheveu sur la soupe : « Utilisez un papier (vierge); placez le Pentagramme approprié (soit avec, soit sans cercle externe) d’invocation.

Si c’est un cercle, tracez-le d’abord. Le Sceau du Gouverneur auquel la nature de la question se rapporte le plus doit être placé ainsi dans le Pentagramme […]. Dans le diagramme de la page 8, on doit utiliser le Sceau de Hismael ».


Géomantie selon Crowley

2/ Après avoir glissé sur la peau de banane étymologique dans le Liber Gaïas, Crowley se jette avec enthousiasme sur une deuxième dans le Liber 777, texte où il revient sur son expérience du domaine, ouvrant son exposé par un magistral :

«La géomancie présente l'avantage d'être rigoureusement mathématique ». L’affirmation est évidemment ridicule si l’on considère que l’intégralité du thème se base sur un tirage au sort des quatre premières figures — c’est même le principe de toute cléromancie : croire que le hasard n’en est point tout à fait, mais c’est un vieil argument que de prétendre à la science parce qu’on fait des additions.

Ce désir de loucher vers la « rigueur » a d’ailleurs joué un rôle important dans le rapprochement de la géomancie avec l’astrologie. Car même si certains historiens veulent déceler dans les figures des astres ou des constellations, l’utilisation des techniques proprement astrologiques est inconnue des premiers géomanciens qui se contentent de tracer des figures dans le sable et d’en déduire des prédictions ; ils ne convoquent pas les Maisons, les Aspects ou la Part de Fortune à la fête. Introduite en Europe, la géomancie va se complexifier à un tel point qu’on peut se demander si les auteurs n’ont pas pioché dans l’astrologie et mathématisé les pratiques parce qu’ils souffraient du complexe des figures tirées au hasard. Il faut introduire des subtilités, allonger la liste des règles, par souci d’enrichissement du sens, mais également pour rattraper l’astrologie dans la cour des arts « rigoureux », ces sophistications satisfaisant à une double illusion : si on fait des calculs, c’est donc scientifique & seul ce qui est scientifique est sérieux. Deux idées fausses, mais qui font toujours leur petit effet.

3/ Entrons à présent dans le détail du Liber Gaïas :

Après l’avertissement, déjà évoqué, concernant la présence d’omissions volontaires, le traité est préfacé par une citation donnée comme extraite des Oracles de Zoroastre [3], un carré de la Magie sacrée d’Abramelin le Mage et par un dessin d’Austin Osman Spare ; tous ces éléments n’ayant aucun lien, de près ou de loin, avec la géomancie.

La citation attribuée à Zoroastre est en fait une diatribe contre la divination :

« Ne dirige pas ton esprit vers les vastes surfaces de la Terre ; car la Plante de la Vérité ne grandit point sur le sol. Ne mesure pas non plus les mouvements du Soleil, collectant les lois, car il est porté par la Volonté Éternelle du Père, et non pour toi seul. Rejette de ton esprit la course impétueuse de la Lune, car elle se meut toujours par le pouvoir de la Nécessité. La progression des Étoiles n’est pas générée pour ton bénéfice. L’ample vol aérien des oiseaux ne donne aucune véritable connaissance, ni la dissection des entrailles des victimes; tout ceci n’est que simple jeu, la base de la fraude: fuis-les si tu désires pénétrer dans le paradis sacré de la piété où Vertu, Sagesse et Équité sont unies ».

L’utilisation du carré dit de « Macaneh » est encore plus curieuse, car ce carré particulier est tiré du dixième chapitre du troisième livre et est destiné à « empêcher les sorciers d’œuvrer »; sans aucun doute est-ce là une protection contre une mauvaise utilisation de la géomancie !

Le dessin de Spare, appelé « Posture de la Mort » est tiré du Livre du Plaisir publié en 1913, après l’article de l’Equinox donc ! À cette époque, Spare était un disciple de l’A∴A∴ de Crowley.

4/ Le texte lui-même s’ouvre par une classique table de correspondances, attribuant à chaque figure géomantique, des signes du zodiaque, un Elément, son sexe, son nom, sa signification, son Génie, son gouverneur et sa planète ; le tout étant assez conventionnel.

D’une façon générale, la méthode proposée par Crowley est, à bien des égards, similaire à celle enseignée dans le traité de géomancie attribué à Henri Cornelius Agrippa, se trouvant dans Le Quatrième Livre de la Philosophie Occulte, bien que des éléments semblent avoir été tirés d’œuvres médiévales et de la Renaissance (les sceaux des esprits planétaires et les tables du témoin et du juge, par exemple, ne sont pas d’Agrippa ou de cette autre courte œuvre De la Géomancie, attribuée à Gérard de Crémone, qui fut incorporée dans l’œuvre d’Agrippa; les attributions des figures aux signes du Zodiaque diffèrent dans certains cas).

Concernant ces correspondances, une remarque s’impose: La géomancie en voulant digérer l’astrologie s’est heurtée à un petit problème d’effectif, comment faire entrer 16 figures dans 12 signes (d’autant que les significations attribuées à tout ce beau monde ne se chevauchent que difficilement) ? De là, personne n’est d’accord sur les attributions. La lecture des traités permet d’ailleurs de constater que toutes les combinatoires ou presque ont été proposées avec le même aplomb.

Un problème quasi similaire se pose avec les Eléments, chaque auteur y allant de sa propre classification. Certes, on peut considérer que tout est négociable étant donné la difficulté, cependant l’option prise par Crowley est loin d’être optimum, notamment parce qu’elle va par endroits à rebours des significations fondamentales des figures ; ainsi Rubeus, le rouge, traditionnellement considéré comme lié la colère, à l’énergie brutale, figure enflammée d’explosion des passions est subsumé à l’élément Eau. Quant à Caput Draconis, figure d’élévation, généralement appréhendée comme abstraite, intellectuelle, voire spirituelle, la voilà affiliée à la Terre.

Crowley semble avoir recopié un tableau de correspondance sans se poser davantage de questions sur sa pertinence.

5/ Le second chapitre souligne rapidement la méthode de construction des figures géomantiques à partir des quatre Mères jusqu’au Juge, si ce n’est que Crowley introduit la prescription de la Golden Dawn de placer « un pentagramme d’invocation » ou un cercle. Le sceau du gouverneur de la nature de la question doit être tracé dans le pentagramme.

Cette recommandation a été répétée de nombreuses fois par d’autres écrivains de la tradition GD, dont Israël Regardie. Toutefois, il semble que le premier à avoir conseillé cette opération soit S.L. Mathers sur base des informations fournies par Heydon.

Si le procédé d’obtention des quatre premières figures (les Figures Mères) par la technique dite du Jet de point est correctement décrit, Crowley ne dit quasiment rien de la formation des autres figures, ne livrant qu’un très allusif « Les Filles sont déduites par la lecture horizontale des mères » [5]. Soit l’évitement participe des « omissions volontaires » évoquées plus haut, ce qui est absurde puisque la plupart des traités géomantiques décrivent ces procédures en détail, soit Crowley suppose que les procédés sont connus – ce qui rend alors l’intégralité du Liber Gaïas inutile, puisque le reste qui n’a rien de très original sera sans doute également connu du lecteur.

En passant, il avale le rôle de Témoins qu’il ne considère être « que des aides au Jugement général ». Plus loin, dans le chapitre IV, selon cette logique de réduction, ces trois figures donnent lieu à des tableaux indiquant la tendance de la réponse. Outre qu’en règle générale, l’utilisation de tables délivrant des verdicts est une catastrophe ôtant tout intérêt à la voyance en la transformant en bataille navale, celles de Crowley sont particulièrement indigentes. On peut se demander quel intérêt conserve un art qui après consécrations de sceaux, mathématiques savantes et quelques autres contorsions, vous livre en guise de « Juge » de la situation, des « bon », « mauvais », des « pas terrible » et des « youpi »…

Les tableaux de correspondances entre les figures et les Maisons sont aussi pauvres.

6/ Le chapitre III présente le système de domification traditionnel de la G.D., ce qui est déjà plus intéressant:

La façon classique de dresser un thème géomantique consiste à tracer un schéma en forme de bouclier divisé en 16 cases, les douze premières correspondant aux Maisons traditionnelles de l’astrologie ; les Mères seront placées dans les 4 premières Maisons, les filles dans les 4 suivantes, etc. La domification préconisée par la Golden Dawn est plus originale puisqu’elle va faire porter l’accent sur les Maisons Cardinales, celles-ci accueillant les 4 Mères. Pour cela, sera utilisé un schéma hérité de l’ancienne manière « carrée » de monter un thème astrologique :

Les 4 Mères vont se placer dans les 4 Maisons Cardinales en commençant par la X et en tournant dans le sens inverse des aiguilles d’une montre (c’est-à-dire respectivement dans les Maisons X, I, IV, VII).

Les 4 filles vont se placer dans les Maisons succédentes en commençant par la Maison XI et en continuant toujours suivant le sens inverse des aiguilles d’une montre.

On place ensuite les nièces depuis la Maison XII.

Nous arrivons ensuite à la partie du manuel que Crowley semble avoir écrite afin de rebuter ceux qui chercheraient à prostituer ce système de géomancie… Du moins, on peut le penser, car cette partie consiste en un ensemble de tables interprétatives dont la seule originalité est d’être un mauvais résumé de textes antérieurs.

Les dix catégories de questions décrites par Crowley : « Vie, Argent, Rang, Propriété, Épouse, Sexe de l’Enfant, Maladie, Prison, Voyage et Chose Perdue » sont disposées de manière assez curieuse et ne sont qu’une version abâtardie des douze catégories des maisons astrologiques.

Israël Regardie dans son The Golden Dawn dit de ces tables : « Je les ai trouvées très peu fiables, n’offrant de réponses que dans une grande contradiction par rapport à la divination proposée par la lecture » [7].

Les cinq dernières pages du Manuel de Crowley couvrent très rapidement les interprétations astrologiques des figures, des aspects, des dignités principales, etc. Un travail très pauvre à nouveau illustré par un mauvais dessin de Spare.

En conclusion, on peut se demander si l’indigence générale du traité doit être imputée à la volonté de conserver l’information sous le manteau, ainsi que Crowley l’affirme – ce qui peut être le cas pour les sceaux planétaires, ou s’il ne convient pas de questionner plutôt sa compétence, d’autant que lui-même nous dit :

« À une époque, nous dit-il, le MAÎTRE THERION l’utilisait beaucoup ; mais Il n’était jamais totalement à l’aise avec ; Il trouvait l’interprétation très difficile. Qui plus est, il Lui semblait que les intelligences géomantiques elles-mêmes étaient d’un ordre inférieur, dont l’étendue de la connaissance se trouvait limitée à une petite partie des choses qui L’intéressaient; et aussi qu’elles possédaient un point de vue propre qui était loin d’être en résonance avec le Sien, de sorte que des malentendus perturbaient constamment le Travail ».

Ce que Stephen Skinner commente ainsi : « Crowley soutient avoir intensivement utilisé la géomancie, mais il avoue qu’il ne s’est jamais senti totalement à l’aise avec ce système, trouvant ses interprétations trop difficiles à déterminer, ce qui ne fait aucun doute s’il a utilisé ses propres tables ! »

* Cette critique s’inspire partiellement du travail de Stephen Skinner, Terrestrial astrology, divination by geomancy, Routledge & Kegan Paul, London, 1980.

** Les citations du Liber Gaïas ont été traduites par Spartakus Freemann. Le texte original est consultable en ligne ici : Liber Gaias.

Aleister Crowley & l’Ordre Hermétique de l’Aube Dorée


En 1898, quand il avait 23 ans, Crowley lu le livre d’Eckarthausen, La Nuée sur le Sanctuaire. Cela eu un grand effet sur le jeune homme, car le livre parlait du Sanctuaire Secret des Esprits, dans sanctuaire intérieur qui détiendrait tous les secrets relatifs à Dieu et à la Nature. Aiguillonné par cette idée, il décida de se mettre à la recherche d’un tel ordre occulte qui pouvait lui offrir ce qu’il désirait depuis si longtemps : la connaissance des mystères qui lui permettrait d’être véritablement supérieur à tous.

Envisagez un instant la situation du jeune Crowley dont les jeunes années avaient été dominées par une religion rude et sans compromis qui ne promettait la vie éternelle qu’à ceux qu’elle estimait dignes et qui s’étaient conformés aux règles qu’elle avait établies. La lecture de ce livre, cependant, offrait une nouvelle perspective, une illumination pouvait être atteinte par l’étude et la connaissance (en fait par la gnose) et non par la soumission et par la fidélité à la Sainte Loi. Ceci devait fortement attirer Crowley qui ne se ressentait pas le besoin de se conformer à un système qui pris en horreur et qui préférait l’étude et la recherche.

Crowley commença ses recherches tout de suite et, plus tard cette même année, il fit la connaissance, à Zernatt, de Julian Baker à qui il expliqua ce qui cherchait. Baker, un étudiant du monde de l’occulte, devait l’introduire comme au sein de l’Ordre Hermétique de l’Aube Dorée. Cet Ordre était une société secrète ésotérique qui s’occupait de magie rituelle, de Qabalah et d’autres sujets occultes et mystiques. Ses origines furent sujettes à de nombreux débats bien qu’il soit généralement admis que William Wynn Westcott en fut le fondateur. Il nous faut à présent décrire quelque peu l’histoire de cet Ordre, son organisation et les raisons qui ont poussé Crowley à y entrer.

Le Docteur Westcott, un médecin légiste de Londres, franc-maçon, était profondément impliqué dans une société maçonnique de « marge », la Societas Rosicruciana in Anglia (S.R.I.A.), dont les buts étaient l’étude de la philosophie et du monde de l’occulte (la Qabalah et l’Hermétisme).

Insatisfait de cet Ordre qui ne pratiquait aucune magie réelle, n’existant que comme un simple groupe de discussion, il décida d’inventer un nouvel Ordre. Cependant, du fait de la nature même des ordres occultes, il avait besoin d’une origine authentique et bien déterminée. Il y réussit en « traduisant » quelques manuscrits codés « découverts » par un maçon dans une librairie. Ceux-ci, clamait-il, étaient des fragments de rituels magiques avec une adresse en Allemagne d’un ordre d’adeptes rosicruciens.

Il semble que les fameux manuscrits codés qui sont à l’origine de la fondation de l’Aube Dorée sont issus de l’imagination d’un autre personnage : Kenneth MacKenzie. Mais MacKenzie décéda en 1870, et l’on peut supposer que la création d’un ordre comme l’Aube Dorée était un projet déjà envisagé et que Westcott n’a fait que le récupérer et le concrétiser.

En 1887, avec la coopération de deux autres personnes, le docteur Woodman et Samuel Liddel Mathers, Westcott fonda le premier Temple de l’Aube Dorée, sur base d’une Charte donnée par les chefs de l’Ordre en Allemagne. Ce Temple qu’ils appelèrent « Isis-Urania », se réunissait au Mark Mason’s Hall, et ensuite à Great King Street à Londres.

L’Aube Dorée possédait une structure hiérarchique comme beaucoup d’autres institutions occultes, de la Franc-Maçonnerie à la société de la Rose-Croix.

L’Ordre était réparti en 11 Grades ou Degrés qui représentaient une progression successive dans l’apprentissage et les capacités magiques de l’adepte. Chacun de ces grades était représenté par un symbole ésotérique tiré de l’Arbre de Vie qui faisait partie du corpus de la Qabalah. La hiérarchie était divisée en trois Ordres représentant chacun une certaine classe d’adeptes.

L’Ordre le plus bas était nommé "Aube Dorée" et était constituée par les étudiants qui avaient étudié les doctrines magiques et réussirent des examens sur ces sujets. Le second Ordre était intitulé la "Rose Rouge & la Croix d’Or" au sein duquel les adeptes pratiquaient réellement l’art magique. Le troisième et dernier Ordre était connu comme l’"Étoile d’Argent" (Astrum Argentinum) et était composée des adeptes qui avaient "traversés les Abysses" et qui étaient devenus des maîtres dans l’art magique.

Les 5 grades du premier Ordre étaient très académiques, chaque grade avait un certain nombre d’aptitudes à perfectionner et de connaissances à acquérir. Par exemple, les adeptes devaient réussir à dominer le plan astral par la méditation et certaines formes d’exercices de yoga. Les connaissances requises étaient principalement Qabalistiques bien que d’autres parties de la doctrine occulte devaient être étudiées également : le Tarot, l’Enochien, la magie et la magie cérémonielle…

L’Oeuvre à accomplir au sein du Second Ordre était de parvenir à la « Connaissance & Conversation avec son Saint Ange Gardien ». Le SAG individuel est une intelligence céleste (un chef secret selon certains) que n’importe qui est capable d’atteindre au travers de la méditation. Ce contact était très bénéfique puisqu’il devait permettre à l’adepte de maîtriser son potentiel et ainsi d’atteindre et de dépasser les Abysses afin de devenir un véritable Maître. Ceci était considéré comme étant le Grand Oeuvre de l’Ordre et il est intéressant de lire les différentes narrations d’adeptes qui disent avoir réussi cette opération.

Aux environs de 1891, le chef de la branche allemande de l’Ordre – Madame Sprengel – décéda et il n’y eut plus aucun contact ultérieur suite à une réponse de l’Ordre qui déclarait que ceux qui voulaient apprendre plus avaient déjà en leur possession les moyens de le faire. Cela impliquait qu’ils devaient entrer en contact direct avec les "Chefs Secrets", un groupe ténébreux d’individus qui étaient les maîtres immortels de tous les autres maîtres de par le ponde. Ces Chefs Secrets étaient sensés habiter les régions inhabitées du Tibet ou être des esprits immatériels et éthériques. En aucun cas, les chefs de l’Aube Dorée ne voulaient ou désiraient entrer en contact avec ces âmes…

En 1891, dans le Bois de Boulogne à Paris, Mathers, le troisième chef de l’Aube Dorée proclama avoir établi un contact avec les Chefs Secrets. Il soutint que ceux-ci lui avaient donné l’unique autorité pour diriger l’Ordre, et il prît le contrôle des mains de Westcott, qui démissionna en 1897. Pendant ce temps, l’autre chef, le docteur Woodman décéda. Mathers était maintenant le chef suprême de l’aube Dorée. A cette époque, l’Aube Dorée était une organisation très hétérogène, formée par trois maçons membres de la S.R.I.A., avec des femmes et certains individus que la maçonnerie n’intéressait pas. Certains des membres les plus connus sont Arthur Edward Waite et W.B. Yeats, le poète prix Nobel.

Pour en revenir à Crowley, il fut introduit à Mathers par Georges Cecil Jones, un ami de Baker qui était aussi membre de l’Aube Dorée. Crowley accepta l’invitation de Mathers à rejoindre l’Ordre, et en Novembre 1898, il fut initié comme Néophyte 0° = 0° dans l’Ordre Extérieur de l’Aube Dorée. Il prit alors le nomen de « Perdurabo » (J’endurerai jusqu’à la fin) et fut dès lors connu comme Frater Perdurabo.


Un mois plus tard il devint Zelator et dans les deux mois qui suivirent, il obtint les deux grades successifs. Après une période d’attente statutaire il accéda alors au rang de Philosophus, et attendit l’accès au Second Ordre. Cela représentait une progression stupéfiante, en 6 mois à peine, il accéda au rang de l’Ordre Extérieur de l’Aube Dorée et il pratiqua bientôt la magie selon les enseignements de l’Ordre. Cela a dû énormément lui plaire de rejoindre un ordre comme l’Aube Dorée où il pouvait accéder à de « nouvelles accolades » et être reconnu en tant qu’adepte.

En 1900, Mathers vivait à Paris. Eloigné géographiquement de l’Aube Dorée d’Angleterre, la dissidence apparut. Les adeptes du Second Ordre commencèrent à se rebeller contre son autorité en demandant des preuves de son contact avec les Chefs Secrets. Le 16 février de cette année, Mathers, craignant d’être expulsé de l’Ordre et surtout de son statut de chef, écrivit une lettre à son représentant, Madame Emery (qui était aussi l’Instructeur des Rituels de l’Ordre) et l’informa de la vérité derrière la formation de l’Aube Dorée.

« … Ceci m’oblige à vous le dire sans ambages (et comprenez-moi bien, je peux prouver chaque mot de ce que je vous dis ici et plus encore, et comme lorsque j’étais en conflit avec S.A. [Saper Aude - Westcott] je vous dirai de même) pour le bien de l’Ordre, mais comme cela risque de porter atteinte à la réputation de S.A., je vous conjure de garder tout cela secret vis-à-vis de l’Ordre, pour l’heure actuelle du moins, même si vous restez libre de lui (Westcott) montrer ceci, après mûre réflexion, si vous pensez que c’est approprié. Il n’a jamais été à aucun moment ni en contact physique ni par correspondance avec les chefs Secrets de l’Ordre, il a seul forgé la pseudo correspondance entre lui et eux , et ma langue est restée liée pendant toutes ces années par un serment de Secret envers lui, demandé à moi par lui avant de me montrer ce qu’il avait fait ou provoqué ou les deux… »

Le lecteur pourra se référer à l’introduction de l’excellent « Dogme et Rituel de l’Aube Dorée » (éditions des Gouttelettes de Rosée, 1999) pour une explication plus détaillée de l’historique et des rituels de l’Ordre. Et enfin, se référer aux annexes afin de lire la correspondance attribuée à Mrs. Sprengel et aux adeptes allemands.

Quelques jours auparavant, le 13 janvier, Crowley s’était vu refusé l’initiation au Second Ordre, au grade 5° = 6°, par ceux qui dirigeaient l’Ordre en l’absence de Mathers. Il voyagea alors jusqu’à Paris pour demander à Mathers de l’Initier lui-même. Mathers accepta sous la condition que Crowley lui prête un serment d’allégeance absolue et que Crowley le reconnaisse comme seul chef de l’Ordre.

Ainsi, Crowley devint Adeptus Minor de l’Ordo Rosae Rubae et Aurae Crucis. A son retour à Londres, Crowley se rendit au quartier général du Second ordre afin d’obtenir les copies des rituels du grade qui lui étaient maintenant dus. Cependant, on les lui refusa et il ne fut pas reconnu comme Adeptus Minor du fait que l’initiation avait été donnée par Mathers (la secrétaire à cette époque était Madame Cracknell que Crowley n’appréciait pas beaucoup). En rage, Crowley retourna à Paris afin de tout raconter à Mathers et comment les choses se passèrent. Que sa rage soit due au fait qu’on lui refusa la reconnaissance de son nouveau statut ou de la rébellion ouverte contre l’autorité de Mathers, personne ne peut le dire, mais dans ses Confessions, Crowley écrira : « … l’institution de Londres était en révolte ouverte contre le Chef… » et ne fît aucune mention de ses sentiments à ce sujet. Ainsi, on peut supposer que c’est réellement le manque de loyauté de Londres qui le mit dans cet état.

Finalement, Crowley quittera l’Ordre de l’Aube Dorée, rompra avec Mathers et, en 1904, fondera son propre Ordre, l’Astrum Argentinum dont il sera le Magus Suprême. Dans sa revue magicke Equinox, il publiera le matériel de l’Aube Dorée à sa disposition et entrera alors en conflit ouvert avec les continuateurs de l’Ordre.

L’Aube Dorée a donc bel et bien joué, comme nous venons de la voir, un rôle primordial dans la formation magique pratique & cérémonielle de Crowley. L’enseignement de l’Ordre constitue la base sur laquelle il fondera son propre système, la « Magicke », en repiquant les éléments enochiens, qabalistiques, théurgiques, astrologiques et en les modifiant selon les spécificités de sa propre doctrine. Il finira par inclure ces éléments dans la révision des rituels de l’Ordo Templi Orientis, dont il deviendra le Grand Maître sous l’impulsion de Théodore Reuss.

LE TAROT DE CROWLEY : LE LIVRE DE THOT


Aleister Crowley (1875-1947) fut certainement un homme hors du commun. Le tarot de Crowley dit "Miroir des Ombre" ou "Tarot de Thot" est, de toute apparence, la création d’un illuminé! Les illustrations des arcanes ont été réalisées par Lady Frieda Harris, sous la direction du fameux occultiste.

Bien que Lady Harris n’en savait que très peu au sujet des tarots et de la divination, elle parviendra à intégrer avec grande sensibilité toutes les finesses de l’ésotérisme du nouvel âge dans ses peintures... En ce sens elle fut une pionnière du « psychédélisme ». Aussi, sous l’impulsion de Crowley, elle a créé le premier tarot avec un style qui mêle occultisme, kabbale et érotisme.


De nombreuses cartes furent peintes en plusieurs versions avant de trouvées l'approbation de Crowley. Plus de cinq ans passèrent avant que toutes les cartes fussent accomplies.

Ce tarot fût publié pour la première fois en 1969, après le décès de Crowley ainsi que de Lady Harris. Les peintures originales de Lady Harris se trouvent actuellement à l'institut Warburg, université de Londres.

Crowley croyait que les atouts du tarot, ou Atus de Tahuti, comprenait un système complet d'hiéroglyphes, qui représentaient la totalité des énergies de l'univers. Il a recherché à reconstruire les atouts grâce à une combinaison de l'astrologie et de l'Arbre de Vie avec dix sephiroth et les vingt-deux voies de liaison.

Les noms de quatre des arcanes majeurs, ou "Atu", ont été changés; l'arcane VIII l'ajustement a replacé la justice, l'arcane XI LA CONVOITISE a remplacé LA FORCE, l'arcane XIV L’ART a remplacé LA TEMPÉRENCE et XX L’AÏON ou L’ÉTERNITÉ a remplacé LE JUGEMENT.

Dans ce jeu de Tarot, on évolue dans un monde presque surréaliste. Les illustrations nous invitent à nous perdre dans un univers de symboles occultes, des allégories faites d’illusion, d’allusions, de trompe-l’œil et d’artifices... Ces illustrations tordues nous invitent à la rêverie ou au fantasme....

En vérité, les motifs de ce tarot s’affichent comme un amalgame indigeste d’éléments et de symbolisme aux diverses connotations, qui recouvre de multiples traditions et différentes disciplines et en fin de compte, on pourrait le surnommé "le tarot de la confusion"...

Comme avec toutes les discipline que Crowley a aborder, il s’est encore permit de changer complètement la tradition et il a créé son propre système, son propre dogme, et sa propre tradition... (pas très propre) Et enfin, de la même manière, Crowley s’est servi du tarot de Marseille, et d’éléments de la tradition ésotérique pour inventer son système et son tarot, selon sa vision et sa conception...

L’Art premier de Crowley reste : "L’art de désobéir, et de ne se pas conformer"....

VOICI DES OUVRAGES DE CROWLEY, QUE VOUS POUVEZ CONSULTER :
(cliquez sur l'image pour accéder aux documents)

DOGME DE LA KABALE, d’Aleister Crowley
L'ŒUVRE DE CEPHALOEDIUM, d'Aleister Crowley.

4 commentaires:

  1. Intéressant. En tout cas, je suis tombée sous le charme du tarot de Thot et pourtant, je me suis toujours dit qu'un seul deck suffit, mais disons que celui-ci, j'espère bien l'avoir en main un jour.

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  2. Seems like interesting stuff to know. On the whole tarot reading will be something which can help us find a solution for the problem which we have been facing.

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  3. un charlatan, seul le tarot de marseille est crédible

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    1. Est crédible ce qu'on veut bien croire pour soi . C'est un support comme tout autre oracle ou tarot , et il n'y a pas que le Marseille ou le Rider Waite ... A chacun de voir ce qui lui correspond le plus pour s'éveiller. Les nourritures sont variées. Et quand on est bien avec un jeu ou qu'on est attiré par un jeu, (comme le font les cristaux ) alors ne pas hésiter, c'est ce qui est juste pour soi ! Ecouter son coeur , c'est la voie royale de l'éveil.

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